SOCIÉTÉ : L'or vert, moins propre qu'espéré

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SOCIÉTÉ : L'or vert, moins propre qu'espéré

ENERGIE. Comparés aux carburants d'origine fossile, les biocarburants ne seraient pas une très bonne affaire pour l'environnement, selon une étude commandée par trois offices fédéraux.
Il n'y a pas de miracle. Les carburants tirés de la biomasse (ou biocarburants) ne sont pas forcément plus respectueux de l'environnement que les carburants d'origine fossile. Telle est la conclusion d'une étude menée par l'Empa, un institut de recherche saint-gallois réputé, sur mandat des offices fédéraux de l'énergie, de l'environnement et de l'agriculture. Un énorme pavé dans la mare au moment où le parlement discute de possibles exemptions de taxes pour cette filière énergétique, considérée de plus en plus largement comme une excellente solution au problème des émanations excessives de gaz à effet de serre.
Le rapport de l'Empa, «Ökobilanz von Energieprodukten», compare les biocarburants produits actuellement aux carburants traditionnels. Il reconnaît que les premiers émettent beaucoup moins de gaz à effet de serre que les seconds, à l'exception de la filière du soja. En revanche, il les accuse de présenter un bilan mitigé lorsque est prise en compte la quantité d'énergie utilisée pour les produire. Et un bilan franchement négatif, lorsque sont retenus leur impact sur l'air, la terre et l'eau. Bref, s'ils réchauffent moins la planète, ils la polluent bien davantage. Il ne resterait plus qu'à choisir entre la peste et le choléra.
Dans le domaine des biocarburants, c'est la production de la matière première qui pose principalement problème, insiste l'étude. Elle induit une vaste déforestation, souvent par brûlis, dans les régions tropicales, ce qui provoque de vastes dégagements de CO2, accroît la pollution de l'air et porte atteinte à la biodiversité. Elle pêche par de faibles rendements à l'hectare, une fertilisation intensive et des labours lourdement mécanisés en zones tempérées. Ici comme là, l'environnement en pâtit.
Chef de projet et coauteur de l'étude, Marcel Gauch tient à ce stade à nuancer le tableau. «Il existe en réalité du bon et du mauvais dans le secteur des biocarburants. Le bon, ce sont les déchets organiques, qui s'avèrent très intéressants. Ils sont là et exigent de toute façon d'être traités. Autant les transformer en énergie. Le mauvais, ce sont les plantes, qui, elles, doivent être produites, ce qui suppose d'utiliser de l'énergie pour en obtenir, d'où, au bout du compte, une efficacité forcément moindre. Les énergies fossiles ont l'avantage de reposer sous terre. Le seul effort à réaliser est de les extraire.»
Les auteurs du rapport se servent de deux indices pour comparer les performances environnementales des différents types de carburants: la méthode suisse de la saturation écologique (UBP 06) et la méthode européenne Eco-indicator 99. Pour l'un comme pour l'autre, les biocarburants à base de plantes présentent un bilan mitigé. Ceux issus de déchets ont par contre d'excellentes performances. L'ennui est qu'ils ne seront jamais assez abondants pour répondre aux besoins de l'humanité. Selon Marcel Gauch, ils n'en couvriraient pas même 10%. Les biocarburants seraient à oublier? «Non, répond le chercheur. Lorsque l'énergie sera utilisée plus efficacement, ce pourcentage montera. Et il apportera une contribution intéressante à un effort diversifié.» Pas un remède miracle, donc. Mais pas un gadget non plus.

«Au diable le défaitisme!»
Etienne Dubuis

Quel avenir pour les biocarburants? Interview.

Professeur associé au Département de biologie moléculaire végétale à l'Université de Lausanne, Christian Hardtke plaide pour la patience.
Le Temps: Les biocarburants d'origine végétale causent-ils trop de dégâts écologiques pour rester une option valable?
Christian Hardtke: Cela peut être le cas si l'on ne prend en compte que les biocarburants produits à partir de cultures traditionnelles. Ces cultures sont poussées pour fournir une biomasse de haute qualité d'un certain type. Je pense par exemple aux grains de maïs et aux betteraves. Mais il existe des plantes beaucoup plus sobres, qui n'ont pas besoin d'engrais et ne requièrent que peu d'eau pour pousser. Elles sont susceptibles de fournir autant de biocarburants sans préjudice pour l'environnement. Tout au contraire.
- Les agriculteurs américains qui se sont lancés dans la production massive de biocarburant à partir de maïs font tout faux?
- Non. Ils font ce qu'ils ont aujourd'hui la possibilité de faire. Il y a surproduction de maïs aux Etats-Unis. Autant l'utiliser à la fabrication de biocarburant. Et si ces paysans choisissent de moins exporter, c'est leur problème. Sur le plan strictement environnemental, leurs cultures ne causent pas davantage de nuisance parce qu'elles servent à la production d'énergie et non de nourriture.
- Ce genre de pratiques vous paraît-il condamné à long terme?
- Très certainement. Et ce pour des raisons aussi bien éthiques que pratiques. A long terme, il s'agit de passer à une deuxième génération de biocarburants, basée sur la matière lignocellulosique, tiges, feuilles, etc. Les plantes idoines sont connues. Et la technique sera bientôt maîtrisée: six usines expérimentales sont en voie de construction aux Etats-Unis. Ne nous laissons pas gagner par le défaitisme de ceux qui ne voient que les biocarburants existant aujourd'hui au lieu de s'intéresser au formidable potentiel de leur filière. Nous devons avoir un peu de patience et la volonté d'aller de l'avant.

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